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L’annonce faite au patient

Cette semaine, je passais une mammographie et échographie de contrôle. Depuis quelques temps, le rituel revient tous les deux ans. Aucun cas de cancer du sein dans la famille, je m’y rends plutôt sereine. Mais, plus les années passent plus je sens monter l’anxiété lors du verdict médical. 

Mardi dernier, j’avais rendez-vous pour ce dépistage bisannuel. La technicienne prend les clichés puis va les montrer au médecin, dans la salle d’à côté. Elle revient pour refaire deux radios du sein gauche. Je sens le stress monter. Elle repart et c’est le médecin qui fait son apparition, me faisant une tapette sur les bras d’un air que je trouve bizarre. Le « verdict » tombe : « je vois quelque chose, ça peut être sérieux ». S’en suit une logorrhée à laquelle je comprends peu de choses. Je retiens : ACR 4 ou 5. Je crois saisir qu’en d’autres termes, je suis un cas suspect eu égard à mon âge, mon traitement pour femme ménopausée, etc. Mais, l’homme dit aussi que jamais il ne prononce le mot « cancer » entre ces quatre murs (sic).

Commence alors l’échographie. Le médecin cherche, cherche encore, s’acharne… Mais, ne voit rien. Je sens presque poindre de la déception dans sa voix. Il admet que le chose en question est « toute petite » mais qu’il y a bien une « distorsion architecturale ». J’ose un : « c’est une bonne nouvelle si on ne voit rien à l’échographie ? ». La réponse semble être « non ». Reprend alors un nouveau monologue. Il s’interroge sur la suite à donner : biopsie, IRM… Il penche finalement pour la seconde solution et m’enjoint de prendre rendez-vous (avec lui). 

Je sors de là dans un état étrange. J’ai l’impression de tanguer. Je me mets dans la queue pour payer. Le médecin refait alors son apparition, me tape à nouveau sur les bras et m’annonce : « l’intelligence artificielle dit que c’est bénin, mais je veux vérifier de mes propres yeux ». Je retrouve un peu d’air et quitte cet endroit en me demandant quand même s’il n’y a pas eu un grave dysfonctionnement dans la chronologie des évènements et des « annonces » qui m’ont été faites. L’IRM a été fixé au lendemain. Une chance. L’attente ne sera pas trop longue. Car, je rentre chez moi la boule au ventre, ballottant entre un « et si… » et des « ce n’est pas possible ». Mon entourage me rassure. Mais je tangue quand même. 

Mercredi, je me rends au rendez-vous, pressée de savoir, anxieuse de savoir. L’IRM est moins pénible que ce que j’appréhendais – je suis claustrophobe – et l’attente des résultats interminable. L’infirmier qui m’a pris en charge finit par m’appeler et me guide vers le médecin en train de regarder les clichés. Le nouveau verdict tombe : « vous n’avez rien. L’intelligence artificielle nous a à nouveau supplanté ». Il me montre une courbe, m’explique que si ça avait été malin, elle n’aurait pas du tout cette forme-là. Mais, il insiste, me redemande si j’ai des facteurs de risque, regarde à nouveau les images, en superpose deux et enfin me libère en me disant qu’il aimerait me revoir dans un an. Je ne pense pas honorer ce rendez-vous. 

Je suis sortie dans le froid glacial, un sourire aux lèvres, respirant à plein poumon, savourant ce soleil d’hiver qui éclaire mais ne réchauffe pas. Peu importe. Je peux reprendre le cours de ma vie.